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La fausse extinction des ichtyosaures

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Introduction

Quand ont vraiment disparu les ichtyosaures, ces reptiles marins qui peuplaient les mers il y a plusieurs millions d’années ? Jusqu’à présent, les spécialistes situaient leur déclin à la fin du Jurassique. Valentin Fischer, chercheur à l’Université de Liège, vient de démontrer que leur déclin ne s’effectue qu’au début du Crétacé supérieur, soit environ 50 millions d’années plus tard. Mais les causes de cette disparition restent encore très mystérieuses…

Le Projet

Quand ont vraiment disparu les ichtyosaures, ces reptiles marins qui peuplaient les mers il y a plusieurs millions d’années ? Jusqu’à présent, les spécialistes situaient leur déclin à la fin du Jurassique. Valentin Fischer, chercheur à l’Université de Liège, vient de démontrer que leur déclin ne s’effectue qu’au début du Crétacé supérieur, soit environ 50 millions d’années plus tard. Mais les causes de cette disparition restent encore très mystérieuses…

Avec son long museau (appelé « rostre »), sa taille imposante (jusqu’à vingt mètres de long), sa peau lisse, son corps allongé, son aileron dorsal, ses nageoires latérales et caudale, l’ichtyosaure ressemble comme deux gouttes d’eau à un dauphin. Mais méfiez-vous des apparences : ce reptile n’entretient aucun lien de parenté avec le mammifère et n’en est pas l’ancêtre. Même pas un cousin lointain.

Si les deux espèces possèdent autant de points communs, c’est parce qu’elles ont partagé le même milieu marin. Vivre dans l’eau, forcément, ça nécessite de développer quelques caractéristiques semblables. Mais en réalité, plusieurs dizaines de millions d’années séparent le dauphin de l’ichtyosaure.

Ce dernier fit son apparition sur terre un beau jour du Mésozoïque. Soit environ 250 millions d’années avant notre ère. Ils précédèrent de « peu » (c’est-à-dire de… 20 millions d’années) les dinosaures. Nul ne sait réellement pourquoi ces reptiles finirent par quitter la terre ferme pour vivre en milieu marin. Ils étaient présents aux quatre coins du globe, de l’Australie au Moyen-Orient, en passant par l’Europe et l’Amérique, et s’adaptaient à toutes sortes de zones climatiques, même les plus glaciales. « Leur taille pouvait aller de formes de moins d’1 m. de long à des géants de plus de 20 m. Tous donnaient naissance à leur progéniture directement en mer, et certains étaient des nageurs rapides pouvant plonger à de grandes profondeurs avec des globes oculaires énormes et une physiologie dite ‘à sang chaud’ », détaille Valentin Fischer, aspirant FNRS au sein du Département de géologie de l’Université de Liège et chercheur en paléontologie à l’Institut Royal des Sciences naturelles de Belgique.

Ils vécurent ainsi longtemps, pendant plus de cent-cinquante millions d’années. Cependant, les chercheurs s’accordaient généralement à penser que ces drôles de bêtes avaient majoritairement disparu durant la fin du Jurassique, juste à la frontière avec le Crétacé, il y a 145 millions d’années. Pour quelles raisons ? Les hypothèses les plus largement retenues évoquaient deux éléments de réponse : d’une part des changements climatiques globaux, responsables d’une perturbation des écosystèmes, d’autre part la compétition avec les poissons dits « modernes », apparus durant le Jurassique moyen. Ceux-ci, étant capables de se reproduire très rapidement, auraient fini par supplanter leurs rivaux.

Une version désormais remise en cause par les récentes découvertes de Valentin Fischer. Le doctorant vient de publier un article dans la revue PloS ONE qui démontre que ces reptiles marins sont restés diversifiés et abondants bien plus longtemps que prévu.

Une généalogie fournie !

Durant son mémoire de fin d’étude, il découvre dans le sud de la France un rostre complet datant du Valanginien (Crétacé inférieur), soit quelques millions d’années après l’extinction supposée datée du Jurassique supérieur. En fouillant dans la littérature existante, il trouve la trace de quelques espèces ayant elles aussi dépassé la fameuse limite. Il décide alors d’examiner les spécimens du Crétacé de toute l’Europe de l’ouest afin de déterminer combien d’espèces existaient toujours durant cette période.

« Jusqu’à présent, on pensait que les ichthyosaures du Crétacé constituaient un groupe restreint. Des formes moins spécialisées qui auraient vivoté jusqu’à leur disparition définitive, au cours du Cénomanien (Crétacé supérieur) », raconte Valentin Fischer. Son travail révèlera des résultats bien différents.

Avec l’aide de chercheurs anglais, écossais, russes, et allemands, il exhume certains fossiles enfouis dans des collections de musées depuis de nombreuses années. De nouvelles espèces d’ichtyosaures sont découvertes durant la recherche. Notamment une retrouvée en Allemagne et en Angleterre, baptisée Acamptonectes densus, ce qui signifie « nageur rigide et compact. » Un nom qui indique que le crâne et la colonne vertébrale de cet ichtyosaure étaient solidement soudés, ce qui lui permettait de nager presque uniquement grâce à sa nageoire caudale et à sa queue.

Partant de ces (re)découvertes, il s’applique ensuite à réaliser des analyses phylogénétiques, des sortes d’arbres généalogiques retraçant les liens de parenté entre les différentes espèces. « La phylogénétique permet d’estimer la diversité d’un groupe et de décoder les relations entre ses espèces même lorsqu’il n’existe pas beaucoup de fossiles, explique le chercheur liégeois. En se basant sur le principe de « parcimonie  », qui revient à chercher l’arbre contenant le moins de changements possibles, on obtient une hypothèse d’évolution du groupe considéré. Cette hypothèse est l’évolution la plus probable statistiquement, sans que l’on sache exactement si cela s’est vraiment produit. » Une fois les différentes « familles », genres, et espèces établies, il s’applique enfin à déterminer les taux de survie (celles qui ont passé la limite) et d’extinction.

Conclusions : le taux de survie se révèle beaucoup plus important que prévu. Beaucoup de lignées ayant leurs « racines » dans le Jurassique se prolongent ensuite dans le Crétacé. Ainsi, « l’arbre » révèle que, contrairement à ce que l’on imaginait, les « survivants » étaient très nombreux. « On ne s’y attendait pas du tout. Tout d’un coup, on est passé d’un petit groupe restreint à une multitude de cousins très éloignés. Durant le Crétacé, la diversité était encore plus grande que durant le Jurassique ! »

Les causes mystérieuses d’une disparition
Des résultats qui changent véritablement la donne. L’extinction majeure des ichtyosaures n’a pas eu lieu durant le Jurassique. Au contraire ! Pendant cette période, même si d’autres animaux marins ont bel et bien disparu, nos reptiles se portaient comme des charmes.

Cinq à six genres différents ont en réalité continué à cohabiter, avant de disparaître définitivement durant la fin du Crétacé, il y a environ 94 millions d’années. Une fin de vie plutôt brutale. Du coup, cette « seconde extinction » n’en devient que plus sévère… et toujours aussi mystérieuse. L’apparition des poissons, même si elle a certainement eu un effet, ne peut suffire à expliquer leur déclin. Pas plus que la disparition des bélemnites (des sortes de petites seiches dont les ichtyosaures se nourissaient).

L’explication est peut-être plus globale. Valentin Fischer aurait mis le doigt sur un évènement important, dont l’extinction des ichtyosaures ne serait finalement qu’une facette. « À la même époque, tous les groupes marins semblent avoir été affectés par un fait marquant. Même les plantes montreraient quelques changements. » Un évènement difficile à déterminer pour le moment. Peut-être l’avènement des forêts tropicales humides ? Ou l’un des nombreux changements climatiques et océanographiques qui eurent lieu durant cette période, qui fut sans doute la plus chaude de toute l’histoire géologique ? Ou encore les mécanismes de collision entre continents ? Nul ne le sait encore. « Il existe tellement d’hypothèses… Impossible de donner la cause exacte. »

Prochaine étape : identifier cet évènement énigmatique…

Sources : http://www.reflexions.uliege.be/cms...

Article scientifiques : Accès ouvert à ce lien : https://orbi.uliege.be/handle/2268/....

Fischer et al 2012 New Ophthalmosaurid Ichthyosaurs from the European Lower Cretaceous Demonstrate Extensive Ichthyosaur Survival across the Jurassic–Cretaceous Boundary.pdf

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